2011-01-08


"Éloge de la gentillesse"

Faut-il être gentil avec la gentillesse ? attitude moquée et dénigrée, la gentillesse ne fait plus recette dans un monde cynique où tout don vaut abandon, pour ne pas dire défaite. en faisant preuve de gentillesse, je m'oublie au profit d'un autre : les vieilles morales y auraient vu un signe d'humanité, le monde moderne y reconnaît une incongruité. s'intéresser à la gentillesse suppose donc soit de se soumettre à la raillerie, soit de remettre à sa place le rôle et le mérite de cette notion.

Il ne s'agit donc ni d'être gentil avec la gentillesse ni d'épargner les faiblesses qu'on lui prête habituellement ; il convient seulement de la distinguer en faisant apparaître ses racines, en déroulant ses feuilles et en goûtant son fruit. trop longtemps confondue avec des espèces voisines (niaiserie, mièvrerie, naïveté), la gentillesse est une réalité vivace encore méconnue. Derrière son apparente simplicité se cache en effet une vertu efficace et stratégique aux antipodes des visages qu'on lui prête habituellement. porteuse de valeurs discrètes (la douceur, le bien-être et le réconfort), elle transporte l'homme au-dessus de lui-même et peut modifier substantiellement l'ordre des choses.

Notes sur Tchouang Tseu et la philosophie de Jean François Billeter




Notes sur Tchouang-tseu et la philosophie
Jean François Billeter

À propos de l’héritage antique
“Les lecteurs qui n’ont pas la passion des textes anciens trouveront peut-être absurde l’idée de demander un appui, dans une aussi grande affaire, à un auteur de l’Antiquité dont on sait si peu de choses et dont on a si peu de textes. Mais c’est que ces textes ont une teneur très particulière. Ils contiennent une matière dont nous n’avons pas d’autres échantillons et qui pourrait constituer un antidote puissant, même en petite quantité, contre la tradition dont il s’agit de se libérer. Puissant par ses vertus propres, mais aussi à cause du rôle que ces mêmes textes ont continûment joué à travers les siècles. On les a constamment admirés, mais dans un esprit qui n’était pas le leur. Ils constituent donc, contre la tradition, un argument interne.”

Cet ouvrage reprend certains problèmes abordés dans les Leçons sur Tchouang-tseu et les éclairent d’un jour nouveau. Il aborde en particulier la nature des difficultés sur lesquelles butent les échanges entre l’Europe et la Chine sur le plan de la pensée. Le Tchouang-tseu permet d’appréhender des aspects inaperçus mais essentiels de l’expérience humaine la plus commune. Nul problème n’est compliqué dès lors qu’il est ramené à l’essentiel.

octobre 2010 - prix: 6,10 €
format : 100 x 170 mm
96 pages
ISBN: 978-2-84485-370-7

Leçons sur Tchouang Tseu de Jean François Billeter





Jean François Billeter a dirigé jusqu'en 1999 le département de langue et littérature chinoises de l'université de Genève. Reconnu comme un éminent sinologue, il a su toucher un vaste public sans rien abandonner de sa rigueur et de son exigence intellectuelle.



À propos de l’héritage antique
“Je m’inscris donc en faux contre une sorte d’accord tacite que les sinologues paraissent avoir établi entre eux. Le texte serait si difficile, son état si problématique, la pensée qui s’y exprime si éloignée de la nôtre que ce serait de la naïveté ou de l’outrecuidance de prétendre le comprendre exactement.

Mon intention est de briser ce préjugé. Je ne le ferai pas en essayant d’imposer une lecture particulière, mais en exposant comment je m’y suis pris pour tenter de comprendre le Tchouang-tseu, en présentant quelques résultats que je tiens pour acquis, mais en faisant aussi état de mes doutes et des questions que je me pose. Je souhaite donner une idée des découvertes que l’on fait quand on entreprend d’étudier ce texte de façon à la fois scrupuleuse et imaginative.”

Dans ces cinq leçons prononcées au Collège de France sur l’œuvre de Tchouang-Tseu, figure tutélaire de la pensée taoïste, Jean François Billeter, en partant chaque fois du texte même, qu’il traduit de façon scrupuleuse et sans a priori philosophique, parvient à faire émerger le sens d’une pensée qui n’a rien d’abscons, déconcertante parfois mais toujours précise et profonde.

novembre 2002 - prix: 6,10 €
format : 100 x 170 mm
160 pages
ISBN: 2-84485-080-4

CONSIDERATIONS MORALES de Hannah Arendt



Est-ce que notre aptitude à juger, à distinguer le bien du
mal, le beau du laid, est dépendante de notre faculté de
penser ?

Tant d'années après le procès Eichmann, Hannah
Arendt revient dans ce bref essai, écrit en 1970. à la
question du mal. Eichmann n'était ni monstrueux ni
démoniaque, et la seule caractérisque décelable dans
son passé comme dans son comportement durant le
procès et l'interrogatoire était un fait négatif : ce
n'était pas de la stupidité mais une extraordinaire
superficialité. Une curieuse et authentique inaptitude à
penser.

La question que Hannah Arendt pose est : l'activité de
penser en elle-même, l'habitude de tout examiner et de
réfléchir à tout ce qui arrive, sans égard au contenu spé-
cifique, et sans souci des conséquences, cette activité
peut-elle être de nature telle qu'elle conditionne les
hommes à ne pas faire le mal ?

Est-ce que le désastreux manque de ce que nous nommons conscience n'est pas finalement qu'une inaptitude à penser ?

LE POUVOIR MONSTRUEUX de Philippe Ségur



Présentation de l'éditeur
« L’État est le plus froid de tous les monstres froids », disait Nietzsche.

Dans cet essai, Philippe Ségur s’attache à démontrer en quoi le pouvoir politique est un monstre. En remontant aux sources du pouvoir politique occidental, c’est-à-dire à la période romaine archaïque, aux temps qui ont précédé et suivi la fondation de Rome, en revenant sur la mythologie et sur les traits saillants de la république romaine, l’auteur propose une réflexion sur la nature universelle du pouvoir, sur ce qu’il représente, tant hier qu’aujourd’hui.

Un pouvoir sage et mesuré, la gestion du politique en bon père de famille, l’idée du dirigeant simple et modeste citoyen, cela n’existe pas ou n’a jamais existé que comme accident de l’histoire. Car ce qui caractérise le pouvoir, c’est au contraire sa démesure et sa nécessité de l’afficher. En cela, il est un monstre, un phénomène qui se doit d’être spectaculaire. Et s’il l’est, n’est-ce pas pour dissimuler autre chose, pour capter tous les regards et masquer l’essentiel ?

L’essentiel, c’est la domination, la confiscation de l’autonomie, de la faculté de décider du plus grand nombre au profit de quelques-uns. Ainsi la démocratie, la souveraineté du peuple et le système juridique libéral ne sont-ils qu’un habillage sophistiqué de cette monstruosité, un effet de mise en scène destiné à obtenir la sidération des foules et à faire diversion. Ce subterfuge n’est pas moderne : l’Antiquité y avait pensé avant nous. Avec le déclin des valeurs, notre époque ne fait qu’en souligner le profond nihilisme.

Au-delà de ce constat, l’auteur cherche à savoir d’où vient cette nécessité universelle, cette omniprésence du pouvoir monstrueux : il la trouve dans la nature même du psychisme humain. Celui-ci, en effet, est marqué par le manque, la séparation, un vide à combler, la finitude d’une existence bornée par la mort. Or le pouvoir y répond par l’action qu’il incarne comme un remède au vide, par le sentiment qu’il donne d’une inflation du réel, par l’illusion qu’il procure d’un retour à l’unité et à une forme d’éternité par la célébration de la totalité sociale. Ainsi le pouvoir monstrueux serait-il l’image en miroir, l’image inversée, de la nature humaine : un trop comme une réponse au pas assez.

Buchet Chastel,
160 p. ISBN 9782283024720